mercredi 20 février 2013

Lire Marx de Robert Kurz



La librairie parisienne La balustrade vient de rééditer l'ouvrage de Robert Kurz, « Lire Marx. Les textes les plus importants de Marx pour le 21ème siècle choisis et commentés par Robert Kurz », publié en France en 2002 ce livre était devenu introuvable, épuisé depuis plusieurs années.
Initiative heureuse sinon indispensable mais qui appelle quelques remarques.

Le pavé de mauvais papier (type journaux) se casse en début de lecture, il est difficile à manier surtout pour une compilation de textes dans laquelle forcement il faut manœuvrer les pages et les chapitres. Mais, pas le choix c'est cela ou rien...
Plus grave une annonce très malheureuse de l'éditeur en début de livre appel un commentaire détaillé.

Marx n'est pas à la porté d'un lecteur de 16 ans sorti des écoles poubelles de la République Monsieur Balustrade !                                                                                              Le niveau scolaire baisse, cette fois-ci c'est vrai !

La lecture sérieuse de Marx à toujours été un jeu de pistes embrouillé et plein de pièges dans le passé en France particulièrement. La mainmise des marxistes staliniens sur l’œuvre de Marx rendait IMPOSSIBLE sa lecture dans les années 70/80 et au delà. En effet le Kapital pour ne parler que de lui était censuré de son meilleur chapitre par le Phisolophe officiel du PCF: Althusser, ne perdez pas votre temps avec le chapitre 1 La marchandise et la monnaie conseil-t'il (avant qu'il soit squizé en édition populaire) et ses complices Joseph Roy et Maurice La Chatre fossilisant le "Maître" "Les pauvres ne pouvant payer la science qu'avec l'obole" et Engels qui en fait "La Bible de la Classe ouvrière" alléluia !.
La version "populaire" des "éditions sociales" illisible était volontairement confisqué pour effacer toute trace de la Critique du Fétichisme et de la Valeur.
Restes confus d'idéalisme bourgeois hégelien, délires abstraits du Maître, et au final les profs d'économie marxistes mettaient en garde contre "les complexitées abstraites de la monnaie..." qui heureusement ne figuraient pas au programme des lycées en section économie... Un monde simple pour les futurs consommateurs des 30 glorieuses.
C'est donc seulement par des chemins détournés qu'il était possible d'approcher ces questions essentielles et L'I.S à été le chemin presque naturel pour accéder à ces connaissances tenue secrète par la confrérie des marxistes en France. Encore fallait-il accéder à la lecture de l'I.S. et être capable d'en tirer quelque chose en première lecture ce qui n'était pas simple pour les révoltés des banlieues en marge du caravansérail universitaire.
Mais cela n'était pas la seule difficulté et la seconde difficulté est toujours d'actualité, il s'agit de la maîtrise de la dialectique hégélienne of course...
Pour comprendre Marx il faut se mettre dans la peau du jeune Marx formé à l'école de Hegel et d'abord connu comme le "Meilleur jeune philosophe de sa génération". Marx était un jeune hégélien "de gauche" lorsqu'il va rencontrer la critique sociale de son époque et devenir le théoricien que nous connaissons.
La lecture de Hegel nécessite une étude sérieuse pour aborder le système de la dialectique hégélienne qui est la clé dont Marx fera l'instrument central de son travail "ésotérique" sur le capitalisme.
A l’exception de Lukác qui répétera inlassablement cet avertissement "il ne faut pas traiter Hegel comme un chien crevé" les marxistes utiliserons pendant un bon siècle un simple effet de manche pour évacuer totalement Hegel: "Penseur Bourgeois idéaliste".

Résumons: Pour lire Marx correctement il faut au moins après une première approche comme "Esthétique" et "La Raison dans L’Histoire" étudier soigneusement "La Phénoménologie de l'Esprit" et dans ce cas le "papier" (Jean Hyppolite éditions Aubier) est indispensable ainsi qu'un dictionnaire philosophique et du temps pour cogiter.
L'effet est forcément redoutable, un coup de canon dialectique qui propulse en avant. Pour le banlieusard moyen sorti des écoles poubelles une année semble raisonnable pour digérer "Le Vieux" et dire comme Marx "Ce qu'il manque à tous ces beaux Messieurs c'est la dialectique" !!!
Intro extrait

Dans son objet Robert Kurz s'adresse d'abord aux marxistes qu'il pense récupérables pour une nouvelle lecture de Marx. Dans son Introduction à "Lire Marx" il précise qu'il connaît moins bien les jeunes générations. Pas un mot de Kurz sur les libertaires (et encore moins sur L'I.S. et Debord), son choix est délibéré et définitif mais c'est le choix d'un théoricien Allemand qui écrit en Allemand, un pays ou l'empreinte de l'I.S. est faible et celle de l’École de Francfort très forte.

Une expression revient souvent chez Kurz (mais aussi chez sa compagne et d'autres membres d'EXIT) - Marxisme du mouvement ouvrier - (parti ouvrier, mouvement ouvrier, siècle du mouvement ouvrier) une référence à cette masse de prolétaires totalement soumise à l'esclavage salarié et regroupé militairement dans les usines ou la Valeur capitaliste est arraché en masse au labeur humain déshumanisé.
Le Marxisme de mouvement ouvrier s'organise après la Commune (1871) et devient hégémonique très vite, avant la fin du 19e siècle en Allemagne sous la forme du Parti Social-Démocrate qui contrôle une véritable galaxie d'organisations secondaires, de journaux, de clubs, d'associations et de syndicats avec un incroyable maillage du territoire dans l'Empire Allemand proclamé en 1871 à Versailles. 
Pourtant la trahison de l’Internationalisme aura lieu très vite et dans toute l'Europe dès 1914 lorsque ces organisations rejointes par la majorité des organisations libertaires et anarchistes rejoindront le nationalisme de guerre de leurs pays respectif en votant les crédits de guerre. C'est dans la boue des tranchées que les prolétaires comprendront de quelle trahison ils ont été les victimes et Lénine aura beau jeu de tirer les marrons du feu en choisissant le défaitisme révolutionnaire contre la volonté des parti Social-démocrates, des sociaux-traîtres désormais. Même des libertaires seront séduit par l'appel de Lénine qui relance une perspective révolutionnaire en dehors de la galaxie social-démocrate qui contrôle toujours le mouvement ouvrier. Une scission provoque l'éclatement du mouvement, les sociaux-démocrates restant majoritaires en Allemagne face à une forte minorité qui deviendra Communiste et s'organisera sous l'influence léniniste moins quelques fractions ultra-gauche (Rosa et Karl). En France au contraire en 1923 la scission aboutie à une majorité pour le nouveau PCF qui deviendra leader.
Les marxistes se partagerons ce double contrôle des classes ouvrières dans le monde entier moins quelques fractions libertaires ou ultra-gauche mais les restes de Révolution Mondiale de l’Internationalisme prolétarien seront liquidés définitivement et officiellement lorsque Staline proclame "Le socialisme dans un seul pays". Les organisations internationales contrôles par Moscou ne seront plus que des annexes du KGB pour faciliter les projets de l'URSS et affaiblir de l'intérieur les Etats capitalistes sans aucune perspective sérieuse d'étendre la Révolution mais usant de cette menace pour effrayer les bourgeoisies du monde entier.
Les organisations encore contrôlés par les sociaux-démocrates passent très vite sous la coupe du patronat qui les subventionne largement pour contrer la menace Communiste agitée par L'URSS, c'est la Guerre Froide qui deviendra le scénario imposé après que ce double contrôle ait liquidé les derniers projets contestataires indépendant en 36 en France et surtout en Espagne. Officiellement c'est le fascisme qui se chargera du travail de liquidation facilité par les coups de poignards dans le dos de Moscou et l'abandon voir l'écrasement des rebellions ouvrières alternativement par les sociaux-démocrates (Noske à Berlin contre les spartakistes) et les staliniens (Madrid et Barcelone).
C'est tout ce vécu que traîne le Marxisme Ouvrier entre 1914 et 1989 fin de l'URSS.
Alors Siècle du Mouvement Ouvrier... Ou siècle de sa liquidation ?
Le fait est que le Prolétariat n'est qu'un produit du capitalisme sans capacité de dépassement, sans projet révolutionnaire ontologique en tant que prolétariat ouvrier. Mais que le prolétariat soit produit par le mouvement même du capitalisme ne rend pas caduc les luttes sociales pour affirmer la sociabilité humaine comme dépassement du capitalisme en dehors des étroites appartenances de classe dans le processus de la valorisation capitaliste. C'est une nouvelle conscience humaine en dehors de l'utopie capitaliste en fin de vie qui devient le nouveau projet des amis de la liberté humaine. Et cela même en dehors des mouvements directement contestataires de l'ordre capitaliste en liquéfaction avancée comme la ZAD ou Occupy.

Christophe Guilluy décrit certains germes d'une contre-société en marche dans le mouvement même de la crise finale du capitalisme qui se manifeste depuis longtemps dans les villes abandonnées des USA comme Détroit.
http://www.lemonde.fr/idees/article/2013/02/19/exclues-les-nouvelles-classes-populaires-s-organisent-en-contre-societe_1835048_3232.html

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