mardi 15 février 2011

Victoire des mouvements sans leaders

L'absence de direction unifiée s'est avérée être une force pour une opposition défendant un agenda simple et radical, sur qui le pouvoir ne pouvait avoir aucune prise.
 
C'est un nouveau type de révolution qui a eu raison du régime de Hosni Moubarak. Une contestation menée à grand renfort de Facebook et de Twitter, mais aussi privée de l'appui d'institutions établies. Fédérant des groupes sociaux aux agendas objectivement différents, mouvements de jeunes, Frères musulmans, partis laïcs traditionnels, la contestation était dépourvue de toute direction collégiale ainsi que de porte-parole charismatiques à qui les manifestants auraient pu s'identifier. Ce qui pouvait apparaître comme une faiblesse rédhibitoire s'est révélé au contraire une force.
Ahmed Essily, un célèbre blogueur et animateur de télévision explique que «l'absence de direction mandatée empêchait le pouvoir d'avoir une prise sur nous. Des leaders peuvent être intimidés, manipulés, achetés, pris dans une négociation où le régime aurait fait quelques concessions pour se sauver». Au contraire, un mouvement sans tête et uni dans une revendication à la fois très simple et radicale — le départ immédiat de Hosni Moubarak — n'offrait aucune prise au pouvoir. Cette «stratégie de la savonnette» s'est avérée payante.
 
Toutefois, les manifestants n'étaient pas inorganisés. Une demi-douzaine de mouvements (le Mouvement du 6 avril de jeunes, ainsi que le Mouvement de la jeunesse en colère, les Frères musulmans, l'Alliance pour le changement de Mohamed ElBaradei se consultaient informellement sur l'organisation de la vie place Tahrir. Les manifestants disposaient d'un «ministre de la Santé», de fournitures en boissons et couvertures.
Parce qu'il a déclenché la protestation le 25 janvier et qu'il n'appartenait pas au paysage politique traditionnel, le Mouvement du 6 avril a été sans conteste le plus influent durant les trois semaines de protestations. Il s'est inspiré du mouvement d'étudiants serbes Otpor (Résistance), qui avait lancé en 2000 les manifestations pacifiques ayant abouti, avec l'appui de l'armée, à la chute de Slobodan Milosevic. Otpor, qui a depuis été copié dans les «révolutions de couleur» en Ukraine, Géorgie, Kirghizstan, était soutenu par Freedom House, une association américaine de promotion de la démocratie créée en 1941 et partiellement financée par Washington. Le manuel d'action d'Otpor est le livre Les Politiques de l'action non-violente, publiée en 1973, du théoricien de la désobéissance civile Gene Sharp.
Pour autant, les témoignages recueillis place Tahrir indiquent que la contestation se serait peut être essoufflée sans les monumentales erreurs du régime, au premier rang desquelles la coupure d'Internet pendant cinq jours. «Internet fait partie de nos vies, désormais, c'est un droit fondamental, même pour les gens qui n'ont pas d'ordinateurs et ne s'en servent pas, souligne un jeune manifestant, voir notre pays ainsi coupé du monde pendant des jours a été vécu comme une punition humiliante, ce qui a mobilisé la population.» Le choix de la non-violence a impressionné favorablement le peuple venue défendre la place Tahrir contre les assauts policiers des premiers jours.

Luttes de classes en Égypte - 15 février: Les récupérateurs de la Coalition des Jeunes de la Révolution, après avoir rencontré les militaires dimanche soir, déclaraient qu’un gouvernement civil serait mieux à même de mettre fin aux grèves. «Je pense que beaucoup de ces grèves seront résolues en nommant un gouvernement de coalition rapidement», a dit Shadi El Ghazali à la presse. Les ouvriers demandent la dissolution de la Fédération syndicale étatique.

À Beni Suef, la police a ouvert le feu et arrêté 5 personnes lors de l’incendie de deux locaux municipaux. Les pillards se sont enfuis avec du matériel informatique et des meubles.
 
À Minya, deux prisonniers ont été tués et 11 autres blessés lors d’une tentative d’évasion. L’attaque de la prison, menée de l’extérieur, a duré deux heures. 
Des milliers de fonctionnaires égyptiens se sont mis en grève et ont manifesté lundi au Caire et dans d'autres villes du pays pour réclamer de meilleurs salaires et conditions de travail, dans la foulée du soulèvement qui a poussé au départ le président Hosni Moubarak. L'armée désormais au pouvoir a rapidement réagi, appelant les contestataires à cesser le mouvement de grogne. 
Des centaines de salariés des transports publics ont défilé près du bâtiment de la radio publique, alors que ceux de l'Organisation gouvernementale de la Jeunesse et des Sports manifestaient sur la désormais célèbre place Tahrir. Sur l'autre rive du Nil, dans la capitale, des centaines de conducteurs d'ambulance se sont également rassemblés avec des revendications similaires.
La Banque centrale d'Égypte, de son côté, a décidé de fermer ses bureaux dans tout le pays en raison de la grève des employés de la Banque nationale et de plusieurs autres institutions bancaires du pays. Un mouvement de grève affecte aussi la compagnie aérienne nationale EgyptAir, qui a programmé seulement 31 vols internationaux et 12 dessertes intérieures ce lundi, contre au total 145 liaisons quotidiennes. L'agence officielle Mena a fait état de manifestations dans d'autres villes, dont Assouan (sud) et Alexandrie (nord).
Les guides et professionnels du tourisme ont eux aussi manifesté lundi devant les pyramides, à Gizeh près du Caire, pour appeler les touristes à revenir en Égypte. «Dites à tout le monde que l'Égypte est sûre. Nous sommes prêts à accueillir des millions et des millions de gens comme avant. S'il vous plaît, revenez», a lancé Shahindar Adel, un guide.
Des milliers de travailleurs de plusieurs entreprises du gaz et du pétrole sont en grève, manifestant devant le ministère du Pétrole à Nasr City le 13 février. Parmi leurs revendications économiques et sociales : la fin des pratiques managériales abusives concernant les licenciements, la réintégration des ouvriers licenciés, la hausse des salaires à 400 LE, la création d’un syndicat indépendant, la destitution du ministre corrompu Sameh Fahmy,

Syrie: La bloggeuse syrienne Tal al Mallouhi, 19 ans, a été condamné lundi à 7 ans de prison pour espionnages pour un pays étranger, après un procès tenu à huis-clos, ont rapporté Al Jazeera et l'agence Reuters.
La jeune bloggeuse avait 17 ans quand elle a été arrêtée en 2009. Elle était détenue depuis par les autorités syriennes. Des associations de défense des droits de l'homme inscrivent cette décision de justice dans le contexte d'une intensification de la pression sur les mouvements d'opposition à la lumière des révolutions en Égypte et Tunisie.
Al Mallouhi avait écrit sur son blog qu'elle voulait "jouer un rôle pour le futur de la Syrie", un pays depuis 50 ans sous contrôle du parti Baas. Elle avait aussi appelé le président américain Barack Obama a agir davantage pour la cause palestinienne.

Les autorités n'ont cependant pas clairement lié son arrestation à son blog. Le chef d'accusation officiel est la "révélation d'informations devant rester cachées à un pays étranger". La sentence a été rendue pour "espionnage pour un pays étranger". Le pays étranger en question n'a pas été révélé.
Al Jazeera

Yémen: Sanaa nouveaux heurts Des affrontements ont de nouveau éclaté mardi entre des manifestants qui tentaient de se diriger vers le palais présidentiel à Sanaa et des partisans du parti au pouvoir. 3 000 manifestants, pour la plupart des étudiants, étaient sortis le matin de l'université de Sanaa pour se rendre au palais du président Ali Abdallah"Le peuple veut la chute du régime", répétaient-ils, reprenant le principal slogan du soulèvement en Égypte. 

Maroc: Le 3 février, un groupe de jeunes Marocains a appelé sur le réseau social Facebook à «manifester pacifiquement» le 20 février pour une «large réforme politique» dans le pays. Le gouvernement marocain a annoncé mardi un quasi-doublement des fonds de la Caisse de compensation qui finance la politique publique de subvention afin de pallier la hausse des prix des produits de première nécessité.

Bahreïn: Deux manifestants chiites ont été tués à Bahreïn dans la dispersion par les forces de sécurité de protestations antigouvernementales qui se poursuivaient mardi. Le ministère de l'Intérieur a confirmé dans un communiqué que le jeune homme était décédé «des suites de ses blessures», en indiquant qu'une enquête serait ouverte pour savoir si les forces de sécurité avaient «eu un recours injustifié aux armes».

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