jeudi 4 mars 2010

Le portable, gadget de destruction massive

Depuis l’annonce, mi-mai 2005, de la suppression par STMicroelectronics de 1000 postes en France pour les délocaliser en Asie, syndicats et élus locaux s’affolent pour les emplois de Crolles, dont la "création" a demandé tant de sacrifices et d'humiliations : amendes pharaoniques pour les collectivités en cas de rupture dans la livraison d’eau, obligation de doubler les conduites d’adduction d’eau à travers le Grésivaudan, construction d’un semi-échangeur d’autoroute, subventions publiques, etc.
Comme pour la chimie, le nucléaire et l'armement, l’emploi est la justification ultime de toutes les nuisances causées par le site de l’Alliance. Crolles II et ses 5000 emplois, ce sont des investissements colossaux (2,8 milliards d’euros dont 543 M€ d’aides publiques), la destruction des terres agricoles du Grésivaudan, le transport et le stockage de produits hautement toxiques, les bouchons sur l’autoroute, la guerre économique contre Chinois et Américains, le pillage des ressources en eau, les contrôles d’identité à l’entrée de l’Alliance, la soumission des chercheurs du CEA aux exigences des industriels STMicroelectronics, Philips et Freescale Semiconductors, la visite régulière des autorités - Chirac, Sarkozy, Devedjian, etc. Des nuisances qu’on ne souhaite pas plus aux Chinois qu’aux Dauphinois.
Pour quoi faire ? Des téléphones portables.
Le téléphone portable génère bien d’autres choses que des emplois. Non seulement il accélère la destruction de la planète, mais il contribue à la technification totale du monde et à l’autisme social. Des effets dont jamais les chercheurs du CEA-Léti, sous-traitant de Nokia, ne parlent dans leurs réunions mensuelles à la Fnac de Grenoble, ce débitant de téléphones prétendûment "agitateur d’idées".
Revue des ravages de ce gadget de destruction massive.
                 Le téléphone portable, gadget de destruction massive
                  Pourquoi il n'y a plus de gorilles dans le Grésivaudan

De Grenoble à Chambéry la vallée du Grésivaudan se déroule entre les massifs de Chartreuse et de Belledonne, suivant les méandres de l'Isère. Jusque dans les années 1960 le promeneur y découvrait un "verger magnifique", une nature qui parlait "à l'imagination et la pensée" : "sous les vignes courant en feston entre les arbres fruitiers, se succèdent de petits carrés de luzerne, blé, chanvre, maïs : une merveille de petite culture."1 Les villages de Crolles et Bernin, à 20 km de Grenoble, ont aujourd'hui des allures de zone commerciale américaine – môles commerçants, publicités criardes, bretelles d'autoroute, parkings et lotissements. Nous sommes au cœur de la "Silicon Valley à la française", dans une agglomération de "statut international" dont les métastases colonisent les derniers prés, où les enfants ignorent que leurs ancêtres se baignaient dans les chantournes, les vieux canaux d'irrigation. C'est à Crolles 2, zone industrielle à cheval sur les deux communes, qu'est implantée "l'Alliance", unité de production de STMicrolectronics – associé durant quelques années à Philips et Freescale Semiconductors (Motorola)2. Crolles 2, ce sont des investissements colossaux, les plus importants depuis la construction des dernières centrales nucléaires (2,8 milliards d'euros dont 543 millions d'aides publiques) ; c'est l'importation à grands frais d'ingénieurs américains et hollandais et son corollaire immobilier, l'explosion du prix des logements ; le pillage des ressources et la pollution du voisinage ; les contrôles d'identité à l'entrée de l'Alliance ; la soumission des chercheurs du Commissariat à l'Energie Atomique (CEA) de Grenoble et des élus locaux aux exigences des industriels ; la visite régulière des autorités - Chirac, Sarkozy, Devedjian, etc. LA fierté du techno-gratin. Pour quoi faire ? Des téléphones portables.
               "Allo, c'est moi. J'suis dans le bus. J'arrive. A tout de suite."
Ne souriez pas. Si vous trouvez dérisoire le résultat de ces sacrifices, gaspillages et destructions, c'est que vous n'entendez rien à la réalité économique. Le téléphone portable, c'est une innovation, et comme l'a expliqué Michel Destot, maire de Grenoble, avec l'innovation "apparaît le développement des activités économiques qui génère lui-même des emplois pour l'ensemble de nos concitoyens. Il y a là une véritable mine d'or, prenons-en conscience."3 Le téléphone portable génère bien d'autres choses que des emplois et de l'or. Non seulement il accélère la destruction de la planète, mais il contribue à la technification totale du monde. Des effets dont jamais les chercheurs du CEA, sous-traitant de Nokia, ne parlent dans leurs conférences mensuelles à la Fnac, ce débitant de téléphones prétendûment "agitateur d'idées".                    
                                           Semiconducteurs, maxi-nuisances
Contrairement à ce qu'elle prétend, la micro-électronique est aussi polluante que bien des industries low-tech. Derrière sa façade clinquante, le téléphone portable est un concentré de nuisances. D'abord à cause de ses puces électroniques. Eric D. Williams, chercheur à l'université des Nations Unies à Tokyo, a mesuré les éléments. nécessaires à la fabrication d'une puce de 2 grammes. Résultat : 1,7 kg d'énergie fossile, 1 m3 d'azote, 72 grammes de produits chimiques et 32 litres d'eau. Par comparaison, il faut 1,5 tonne d'énergie fossile pour construire une voiture de 750 kg. Soit un ratio de 2 pour 1, alors qu'il est de 630 pour 1 pour la puce4. Comme leurs homologues guyanais, les orpailleurs high-tech chers au maire de Grenoble s'enrichissent en pillant les ressources naturelles et en saccageant l'environnement.
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1 - Tableau de la géographie de la France, Paul Vidal de La Blache, 1903, réédition aux éditions de la Table Ronde en 2000
2 -  cf "Pour en finir avec Crolles 2", sur www.piecesetmaindoeuvre.com
3 - In L'espace alpin et la modernité, bilan et perspectives au tournant du siècle, sous la direction de Daniel J. Grange, PUG 2002
 

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