jeudi 11 février 2010

Conscience de classe

Conscience de casse
Presque un gros mot dans la fosse à purin  spectaculaire-marchande du 21e siècle. 
Mais où il est, le prolétariat ?
_______________
__

La revue Variations présente un numéro hors-série, l'essai Conscience de casse d'Alexander Neumann. Il élabore une critique du "monde tel qu'il va" en s'appuyant sur la sociologie de l'école de Francfort. Allusion ironique au célèbre ouvrage de Lukas, Histoire et conscience de classe, cet essai développe une analyse du marxisme occidental et de ses lacunes conceptuelles, qui fait rejaillir la formule d’Adorno "Les sociologues doivent affronter cette plaisanterie sarcastique qui pose la question : Mais où il est, le prolétariat ?". Au moment du crash historique de la social-démocratie, du PCF et du discours néolibéral, au moment de la crise mondiale du capitalisme, des cris, des élans utopiques et des suicides que celle-ci provoque, pareille approche sociologique montre que la Théorie critique n'a pas dit son dernier mot.
Un peu de lecture:
Conscience de classe
CONSCIENCE DE CASSE
La sociologie critique de l’Ecole de Francfort

Nulle faute de frappe n’est venue troubler le double titre de l’ouvrage. La conscience de casse veut saisir les brisures et éclats du mouvement émancipateur, afin de sauver ces fragments, au nom d’une critique persistante du monde tel qu’il va. Nommer les choses, prendre conscience de l’étendue des problèmes laissés en suspens par un marxisme doctrinaire à bout de souffle. Alors que le communisme n’est plus que son ombre, que le socialisme européen n’est plus hanté par des spectres, mais mort-vivant, alors que la théorie de la conscience de classe n’a plus de parti ni de
patrie où s’appuyer, il s’agit d’interroger les concepts fondateurs et de scruter les expériences vivantes. Je me réfère en particulier au « courant chaud » de l’école de Francfort dont il sera question tout au long de cet ouvrage.
Le titre du livre est une allusion ironique au célèbre thème de Lukaçs, Histoire et conscience de classe, qui a marqué le marxisme occidental, acquise à l’idée que le parti apporterait la conscience aux opprimés, de l’extérieur de leur propre vie. Vision battue en brèche à travers la chute du mur de Berlin, le débordement des partis ouvriers, une critique créative et des résistances au travail qui ne suivent aucun mot d’ordre préconçu.
Il s’agit ainsi d’exposer sans retenue l’étendue des dégâts du marxisme de parti, afin de troubler la répétition mortifère qu’entretiennent les organisations issues du mouvement ouvrier. Avec l’espoir secret de contribuer à élargir les brèches qui se font désormais jour dans les dispositifs routiniers et les discours doctrinaires qui les justifient.
Pourquoi la crise du capitalisme mondial ne favorise-t-elle pas les courants de gauche, radicaux ou institutionnels, en Europe ? En réalité, ce sont les mouvements d’extrême droite qui progressent, comme le signalent les élections de 2009. Il s’agit de percer à jour ces phénomènes à travers un regard critique.
Ce regard me vient de la sociologie critique de l’Ecole de Francfort, qui ne se limite en rien auxspéculations philosophiques de ses représentants académiques les plus connus, Habermas et Honneth. Intuitivement, citoyens et chercheurs sentent que peu de concepts nomment les dégâts que
provoquent les rapports concurrentiels et autoritaires dont tous font l’expérience. La crise du capitalisme mondial ne fait plus de doute. Des mouvements de contestation vifs arrivent à jeter dans la rue plusieurs millions de personnes, le temps d’un jour ou d’une saison, contre la guerre, la
précarité du travail, à l’encontre des manifestations les plus flagrantes du racisme, de la violence moderne. Contre le fascisme façon pop. Pour l’égalité, la liberté, parfois pour la joie de vivre.
L’espace public n’en garde pourtant à peine la trace. La subjectivité politique des acteurs de la contestation se révèle elle-même aléatoire, tantôt polarisée par la résistance, tantôt happée par l’industrie du spectacle, sinon la dépression. La critique sociale contemporaine approche ces phénomènes de manière plutôt tâtonnante, sans que le travail théorique et l’observation empirique se touchent toujours.
Il ne sert à rien de relativiser des phénomènes qui se confirment tous les jours, je veux parler des ressorts brisés des partis de gauche, des syndicats ouvriers et des Maîtres à penser. Tous nous proposent encore une mise en mouvement qui ne cesse d’engendrer des revers chaque fois plus amples. En France et ailleurs, les partis issus du mouvement ouvrier se montrent impuissants face à des alliances néo-conservatrices. L’Europe de l’Est en témoigne de façon éclatante. En Allemagne, la social-démocratie historique n’arrive à se maintenir qu’en supportant une Chancelière de droite, puritaine et autoritaire. L’ensemble de ces gouvernements ont décrété la “ liquidation de Mai 68 ”, après avoir jeté le discrédit sur le moment égalitaire et libérateur de la Révolution française.
suite PDF

Aucun commentaire:

Archives du blog