Un des dernier membres de feu l’Internationale situationniste tire sa révérence. Raoul Vaneigem reste donc le dernier des situs d'importance.
Les Éditions Allia, Gérard Berréby, Danielle Orhan et Dominique Thomas ont annoncé « avec une profonde tristesse » la disparition de Gianfranco Sanguinetti, survenue à Prague, en Tchéquie, le 3 octobre 2025, à l’âge de 77 ans.
Révolutionnaire, viticulteur, écrivain, poète et penseur critique, l’Italien né à Pully, dans le canton de Vaud en Suisse, fut l’une des grandes figures de la pensée révolutionnaire européenne et un pilier majeur de l’Internationale Situationniste.
Le “Véridique rapport”, ouvrage prémonitoire.
Dans les années soixante, Gianfranco Sanguinetti s’engage dans les mouvements intellectuels et politiques qui bouleversent l’Europe. En janvier 1969, il fonde à Milan, avec Claudio Pavan et Paolo Salvadori, la seconde section italienne de l’Internationale Situationniste, bientôt rejointe par le Vénézuélien Eduardo Rothe.
Cette section de l'IS se distingue dès décembre 1969 lors de l’attentat de la piazza Fontana à Milan, qui fit seize morts et plus de quatre-vingts blessés, en publiant un tract retentissant intitulé Il Reichstag brucia ? (« Le Reichstag brûle-t-il ? ») où elle accuse directement l’État italien d’être responsable du massacre. Un État qui précisons-le n'a plus la moindre souveraineté depuis 1943... Le GLADIO de l'OTAN veille !
Dans le climat de tension extrême qui s’installe alors en Italie, marqué par la stratégie de la tension, les violences politiques et les manipulations des services secrets, Gianfranco Sanguinetti devient une figure très surveillée.
Ses positions radicales, son ton pamphlétaire et ses liens avec les milieux intellectuels révolutionnaires européens, notamment en France, attirent rapidement l’attention des autorités et du GLADIO qui avait déjà frappé l'IS au Danemark à Copenhague par un attentat opéré par un flic Danois en réalité agent pour la CIA...
Engagé dans un dialogue constant avec les penseurs de l’Internationale situationniste, il participe à plusieurs réunions entre militants italiens et français, s’imposant comme un relais entre les deux scènes. C’est dans ce contexte de surveillance et de méfiance croissante qu’il est expulsé de France en juillet 1971 par décision du ministère de l’Intérieur Marcellin.
Proche de Guy Debord ils participent ensemble à l’acte de dissolution de l’Internationale situationniste, proclamé en avril 1972 dans La Véritable Scission dans l’Internationale, texte signé des deux hommes. Tout au long des années soixante-dix Sanguinetti poursuit avec son camarade des actions intellectuelles et politiques subversives, cherchant à prolonger la critique du capitalisme.
En août 1975, il envoie à plus de cinq cents personnalités italiennes une brochure signée sous le pseudonyme de « Censor », intitulée Véridique rapport sur les dernières chances de sauver le capitalisme en Italie.
Sous les traits d’un notable conservateur, il y déploie un discours d’un cynisme implacable, révélant les stratégies des dominants et feignant de prôner, au nom du réalisme politique, l’entrée des communistes au gouvernement aux côtés des démocrates-chrétiens. Ce texte, à la fois pamphlet et piège intellectuel, provoque la stupeur en Italie. Traduit en français par Guy Debord, il est publié chez Champ Libre en 1976 et devient un ouvrage culte de la critique sociale.
En 1980 paraît Du terrorisme et de l’État, ouvrage dans lequel Gianfranco Sanguinetti expose le rôle joué par les services secrets italiens dans les activités des Brigades rouges. Ce livre, publié en français au Fin Mot de l’Histoire, confirme son audace intellectuelle. Cependant, l’interprétation qu’il propose de l’enlèvement d’Aldo Moro en 1978 provoque sa rupture définitive avec Guy Debord qui lui reproche de ne pas avoir pris le risque de se faire dessouder...
En 1980 paraît Du terrorisme et de l’État, ouvrage dans lequel Gianfranco Sanguinetti expose le rôle joué par les services secrets italiens dans les activités des Brigades rouges. Ce livre, publié en français au Fin Mot de l’Histoire, confirme son audace intellectuelle. Cependant, l’interprétation qu’il propose de l’enlèvement d’Aldo Moro en 1978 provoque sa rupture définitive avec Guy Debord.
Le 16 janvier 2016, il y exprime notamment son profond désaccord avec la biographie de Guy Debord écrite par Jean-Marie Apostolidès, parue quelques mois plus tôt, qu’il accuse de trahir la pensée et la personnalité de son ancien compagnon de route.
Parmi ses principaux ouvrages et textes figurent Le Secret, c’est de tout dire ! paru en 1989 chez Allia sous le pseudonyme de Gianni Giovannelli, Le Doge, souvenir en 2012, De l’utilité du terrorisme en 2015, ou encore Le despotisme occidental (à propos du coronavirus).
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