vendredi 5 août 2011

Reconfigurer le temps historique

Interprétation de Marx par Moishe Postone

Ce texte est l’introduction de History and Heteronomy: Critical Essays (UTCP Booklet 12, 2009), livre en anglais est librement téléchargeable. Ce sont les actes d’un séminaire à l’Université de Tokyo autour de la pensée majeure de l’historien américain Moishe Postone, auteur notamment de Temps, travail et domination sociale. Une ré-interprétation de la théorie critique de Marx (Mille et une nuits, 2009).
Point-de-vue strictement marxo-marxiste-marxien (rien n'existe en dehors de nos propres erreurs...). Pour ces gens il est indispensable d'enterrer l'I.S et Guy Debord pour cacher ce qui justement était et pouvait être connu sur ces questions a ce moment,  mais pas par nos joyeux universitaires marxo-marxistes-marxiens... 
Le monde commence en 1986 et 1993 avec Postone sinon rien...


Depuis la chute des régimes socialistes d’État en 1989 et, peu après, l’orientation de la Chine vers le capitalisme de marché, le socialisme et le marxisme semblent faire résolument parties du passé. Ces sociétés qui paraissaient résister au capitalisme et incarner les espoirs d’une alternative ont toutes capitulé. Leur succès est à présent le plus souvent mesuré à la lumière de leur capacité à développer le capitalisme de marché. Par exemple, tandis que la Russie est critiquée pour sombrer dans des politiques quasi-mafieuses et la corruption, les universitaires, et même des chinois de gauche, ont félicité la Chine de réussir sa transition au capitalisme et de développer une forme alternative d’organisation de marché 1
Dans l'ensemble, les marxistes ont eu une période difficile pour saisir les transformations qui ont eu lieu de la fin des années 1960 jusqu’à présent. En particulier, ils ont été incapables de saisir en critique les sociétés du bloc socialiste et les sociétés capitalistes en tant qu'éléments d'une forme plus globale de domination. En effet, explicitement ou implicitement, les marxistes ont souvent pensé au bloc socialiste comme un type alternatif.
Après la chute du mur de Berlin, l'absence d'une alternative a poussé beaucoup d'anciens marxistes à abandonner le marxisme et à embrasser des théories comme le post-structuralisme ou le déconstructionnisme. De telles théories semblent présenter l'avantage d'abandonner les récits de totalisation et les grandioses projets d'émancipation humaine. Elles offrent la possibilité d’une critique de la totalisation, de la rationalisation et de la bureaucratisation (souvent compris en vertu de conditions génériques telles la « violence » ou le « pouvoir ») indépendamment qu’elles se soient produites dans les états en apparence socialistes ou imprègnent le capitalisme néo-libéral qui infiltre notre monde aujourd'hui. Bien que de telles théories aient une certaine valeur critique, elles sont généralement incapables de donner sens à la trajectoire historique du vingtième et du vingt-et-unième siècles, et, parce que les partisans du post-structuralisme habituellement ne pensent pas à la domination ou à la libération en termes de dynamiques et de structures globales, leurs idéaux et leurs critiques de la violence ne sont guère plus qu'une certaine forme de libéralisme.
L'opposition entre l'indétermination historique post-structuraliste et le focus étroit des marxistes traditionnels sur la domination économique a ainsi mené à une impasse. D'une part, nous avons des marxistes qui soulignent les relations de pouvoir concrètes, mais ne réussissent pas à saisir la dynamique globale de domination qui a infiltré à la fois les Etats socialistes doctrinaires et le capitalisme. Au mieux, le marxisme traditionnel se concentre sur les relations de classe dans les états du ‘socialisme réel’ pour développer une critique très restreinte.

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