lundi 14 mars 2011

Pourquoi le capitalisme ne peut être éco-compatible


L'écologie, telle qu'elle est conçue par une large frange du monde politicien, est un cas typique de l'illusion qui mène à penser que nous pourrions diriger l'évolution du capitalisme (ou du moins, du progrès) dans un sens qui puisse enfin devenir favorable aux êtres humains et à ce qu'il est convenu d'appeler la « nature ». Il partage cette caractéristique avec d'autres idéaux, d'autres utopies telles que le marxisme traditionnel dans son renoncement à émettre une critique radicale du travail (considéré comme transhistorique et donc propre à toute société humaine dans son métabolisme avec la nature), le gauchisme étatique dans ses multiples obédiences axant toute alternative sur la promesse d'une meilleure répartition des « richesses » (sans définir au préalable ce qu'elles représentent dans la société capitaliste) et conséquemment, d'une régulation du système productiviste ou encore l'anarchisme ouvriériste consacrant ses efforts militants à faire passer le message d'une sortie du capitalisme par la pratique révolutionnaire de l'autogestion des usines de production (l'industrie étant pourtant la matérialisation ultime du rationalisme productiviste). Les idées vertes sont néanmoins à la mode et tentent d'une façon ou d'une autre (en fonction de l'interprétation plus ou moins osée de ce qu'est le radicalisme dans une analyse de la société actuelle) de construire une alternative à un système perçu avec évidence comme étant destructeur des écosystèmes et de la vie en général. Mais sans se donner la peine d'élaborer une analyse et une critique véritablement radicale de la société capitaliste apte à faire émerger les causes profondes de la débâcle, il peut paraître bien illusoire de proposer un schéma de remplacement qui fasse fi de la nécessité d'éradiquer de nos vies, et de la planète, ce système aliénant qui nous mène droit au mur.
L'écologie est bien autre chose que de reconsidérer les catégories propres au capitalisme en envisageant un rapport à leur encontre qui puisse remettre le monde à l'endroit. Une critique radicale de ces catégories, y compris celle de la nature, par la conscience qu'elle est susceptible d'éveiller, peut être à même de lier à nouveau la pensée à l'action (en remettant en cause la domination de la pensée rationnelle sur la vie) et par là, nous détacher de ces abstractions aliénantes qui nous font observer nos propres vies comme autant de spectacles absurdes (dénués de sens véritable dans une logique folle devenue autonome et dont l'aboutissement inévitable nous effraie). La critique du concept moderne de nature est en ce sens primordiale parce qu'elle peut permettre de saisir les causes profondes de la séparation de l'espèce humaine d'avec son essence et donc de comprendre les enjeux ambivalents d'une bipolarisation entre la pensée rationnelle d'une part et la vie « sauvage », naturelle, d'autre part. Mais à l'opposé, elle peut aussi permettre d'éviter les dérives sectaires des adorateurs d'une nature mystifiée, tels les écologistes profonds, dont le but est de nous livrer à une référence normative d'une nature harmonieuse et idéalisée !
La nature des sentiments
Que ce soit dans les champs immenses de l'agriculture productiviste ou dans les forêts d'exploitation, dans les usines ou au plus profond des mines, la vie palpite au cœur même de l'espace capitaliste. La nature y apparaît comme contrainte de se soumettre et d'apporter tel un tribut sa force de vie, force de travail et de régénération élaborée au fil du temps. La nature y est donc réduite à une somme de possibilités dont se nourrit le capital afin de s'auto-valoriser. La survie de ce dernier repose sur la capacité qu'ont les êtres vivants, dans leur nature, à lui fournir du vivant, de la productivité. Chaque être vivant (hommes, plantes, animaux...) est sommé de contribuer au mécanisme de valorisation qui réclame pour la poursuite de la course folle vers une accumulation sans fin (et sans but !) toujours plus de sacrifices. Mais qu'est-ce donc en fait que la nature sinon un substrat vivant nécessaire à la valorisation du travail mort ?
Ce monde des morts, concrétisé dans les objets-figures du capital (moyens de production, outils de travail, matière première transformée,...) vampirise la vie dans un besoin inextinguible d'auto-accroissement.

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