lundi 22 novembre 2010

Karachi : le scandale dans le scandale

Il y a un scandale, pourtant colossal, qui passe totalement inaperçu dans toute cette histoire tragique qu’est Karachi. Il ne s’agit pas ici d’entrer dans le débat s’il fallait arrêter les commissions de corruption afin d’assécher les rétro-commissions au risque de la mort d’employés de la DNC. Il s’agit d’autre chose qui est condamnable sans aucun état d’âme et qui est, ma foi, un scandale stratosphérique, quoiqu’en ce domaine ce pouvoir a pris la première place de la classe.
Ce qui est fort étonnant dans cette histoire c’est que la presse en a parlé et que, malgré tout, c’est comme si ce n’est qu’une petite pichenette donnée par un moucheron à un rhinocéros, en d’autres mots sans intérêt. On a en reparlé récemment, mais cela ne prend pas plus. Il s’agit pour tant d’un chantage à l’Etat français, chantage qui aurait réussi, chantage impliquant des ministres de la République qui auraient donc permis à ce que le maître chanteur touchât 8 millions d’euros pour la boucler, maître chanteur qui aurait les documents mouillant des politiques (Libération) : Selon des documents inédits obtenus par Libération, cette société offshore a pu servir à violer la législation anticorruption, au moins jusqu’en 2005. Tandis qu’elle a entretenu, au moins jusqu’en 2009, des relations directes avec les plus hautes autorités politiques françaises – dont l’actuel président de la République. Un rôle étonnant pour une société implantée dans un paradis fiscal et qualifiée de « shadow company » (entreprise de l’ombre) par l’un de ses principaux administrateurs, Jean-Marie Boivin, homme-orchestre des commissions sur les marchés de l’armement.Ainsi, dans une lettre du 29 novembre 2006, le comptable luxembourgeois de Heine, Yves Schmit, s’adresse-t-il à Nicolas Sarkozy, pourtant ministre de l’Intérieur, pour régler un problème capitalistique touchant la société. Et en des termes révélateurs d’un lien de subordination : « Votre lettre du 28 septembre nous est bien parvenue. Mais à ce jour, elle n’a pas été suivie d’effet. Nous n’avons toujours pas reçu d’instruction de la part de l’Etat français » (voir fac-similé ci-dessus).
Deux mois plus tard, le 16 janvier 2007, dans un courrier à en-tête de Heine, Boivin demande à Michèle Alliot-Marie, alors ministre de la Défense, devenue depuis ministre de la Justice, de lui « accorder prochainement un rendez-vous ». Une démarche, semble-t-il, fructueuse. Car selon une décision méconnue jusqu’à ce jour émanant de la Haute cour de justice de l’Ile de Man, un accord a été passé sur cette île le 24 janvier 2009, entre Heine et un « représentant du gouvernement français  », avec la participation de deux fleurons de l’armement national, Thales et la DCNS (successeur de la Direction des constructions navales). Il prévoit le versement de 8 millions d’euros d’honoraires à Jean-Marie Boivin. Pour prix de son silence ?
Tutelle. Si MAM n’est que l’un des nombreux interlocuteurs de Heine, et pas forcément le plus assidu, son cas soulève un conflit d’intérêt. En 2007, elle intervient comme ministre de la Défense, alors que la DCNS appartient à 74% à l’Etat. Deux ans plus tard, elle est mutée à la Justice, tutelle d’un parquet qui freine des quatre fers une enquête pénale visant les relations entre Heine et la DCNS…
Cette information est confirmée par Médiapart, du moins par une déclaration de monsieur Menayas récemment entendu par le juge Van Ruymbeke : Question du magistrat : « M. Boivin a-t-il eu peur ? »
Réponse de Menayas : « M. Boivin est une personne très craintive et je l’ai senti impressionné. »
D’après l’ancien directeur financier de la DCN, Jean-Marie Boivin a finalement obtenu gain de cause en janvier 2009 à la faveur d’un protocole signé sur l’île de Man entre Heine, la DCN et l’Etat français. « Je pense que les menaces de M. Boivin ont été prises au sérieux », a sobrement affirmé M. Menayas au juge.
Question du juge : « Si M. Boivin a eu gain de cause, cela ne devait-il pas être la contrepartie de son silence sur ce qu’il savait sur l’identité des agents, sur leurs comptes, et sur les bénéficiaires finaux des commissions ? » En d’autres termes, son silence, précieux pour l’actuel hôte de l’Elysée, a-t-il été acheté ?
La réponse fut sans équivoque : « Effectivement, la transaction, si elle a abouti, devrait avoir permis la confidentialité de ces informations. »

Il a également déclaré ceci : Face au juge, Gérard-Philippe Menayas a d’abord expliqué que « le volume total des commissions était validé, contrat par contrat, par les deux ministres du budget et de la défense ». A l’époque du contrat Agosta, le premier était Nicolas Sarkozy et le second, François Léotard. Deux soutiens de poids d’Edouard Balladur dans la bataille présidentielle de 1995.
 
Philippe Menayas avait l’habitude de noter les petites événements de la vie. Vous trouverez ci-dessous le facsimilé d’une page édifiante.
[IMG]http://i56.tinypic.com/qxl269.png[/IMG]
  • Les deux visiteurs du 26/10 bien mandatés par NS [Nicolas Sarkozy] (source Lux[embourg]). Ils ont été informés que tout devait être réglé avant fin 11
  • le courrier du 18/9 à NS émanant de Michel WOLTER.
  • le coût du clearing [grand nettoyage] (8M€) correspond à JMB [Jean-Marie Boivin] + karcherisation [ah ! ah !] des plateformes n° 2 [commissions occultes] (étant entendu que ceci correspond à la demande des visiteurs du 26/10)
  • le versement est sollicité avant le 23/1 à 14 h 30, faute de quoi la [?] sera [?] le 24/11 et YS se réserve le droit de faire une déclaration aux médias ( ! ! )
La France aurait donc payé le grand nettoyage pour 8 millions d’€ afin de soustraire à la justice ceux qui aurait bénéficié des rétro-pots-de-vin.
 
Il faut noter aussi que la justice française, du moins par son bras armé la police a eu ce pouvoir extrême de bloquer l’action de la police luxembourgeoise : « Il est important de souligner encore une fois qu’un grand nombre de documents tombant sous l’ordonnance à l’adresse 1, rue du Théâtre (siège de Heine, NDLR) avaient été retrouvés mais qu’une bonne partie n’avait pas été saisie sur demande des enquêteurs français sur place », notent les policiers du Grand Duché. Qui ajoutent : « Ce choix a été fait par rapport à l’enquête initiée qui est ouverte en France. Il faut se souvenir qu’une partie du “présent dossier” est classée “secret défense” en France et que l’enquête se limite donc à certains faits. »
Il s’agit bien d’un scandale dans le scandale. Scandale car cela n’intéresse que peu la presse et pourtant à comparer aux 10 millions de francs supposés avoir été versés pour a campagne de Balladur, dans la plus parfaite illégalité, qui ajoute à l’immoralité une attente grave à la démocratie avec qui plus est un contrat vendu à perte alors que Richard, ministre précédant Léotard avait déconseillé cette vente pour cause d’instabilité politique du Pakistan, que deux rapports internes de la DNCI de l’été 1994 déconseillaient cette vente à cause des pertes financières majeures qu’elle occasionnerait, il s’agit en l’occurrence d’un chantage d’une valeur 5 fois de celle des billets de campagne balladurienne, scandale d’un chantage contre un état, qui n’est plus de droit, au bénéfice même pas de la nation - ce qui n’aurait pas été une excuse, mais au moins cela aurait été au service des Français - avec l’argent de la France, le pouvoir de la France au service unique d’une caste qui se protège ainsi de la justice qui devrait passer. On fait donc payer aux Français une chape de plomb sur la vérité enrichissant un maître chanteur déjà enrichi par la corruption d’état et par la vente d’engins de mort(s), attentant ici aussi à la démocratie car la révélation des bénéficiaires de ces rétro-pots-de-vin, si d’aventure, comme le montrerait l’enquête de Médiapart, mais également celle de la police luxembourgeoise, cette affaire était avérée, aurait alors peut-être empêché l’accession de Nicolas Sarkozy au pouvoir suprême et notre malheur à tous.
Il faut évidemment que la justice s’intéresse de près à Jean-Marie Boivin, à cet accord connu, du moins révélé par Libération, qui parle d’un accord de la Haute cour de justice de l’île de Man (ce qui doit être facile à trouver par la justice et à montrer aux Français) en date du 24 janvier 2009 avec un représentant de l’Etat français que l’on aimerait connaître tout comme les commanditaire au sein du pouvoir. Si les règles sont respectées, deux ministres sont forcément intéressés dans cet accord : le ministre de la défense, un certain Morin ( ! ), et le ministre du budget de l’époque (janvier 2009), un certain Woerth ( ! ! ).
Il faut que vous non plus, vous n’oubliez pas ce scandale de ce chantage réussi au coût de 8 millions d’euros au détriment de la vérité avec usage par le pouvoir de la machine de l’état et de ses finances pour protéger ses turpitudes.

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